Pour quoi enseigne-t-on l’Histoire ? 1« L’histoire ne va pas de soi ».
Cette formule, de l’historien polono-français Krzysztof Pomian, aussi simple soit-elle, donne la tonalité de ce dossier n° 69 de la Revue internationale d’éducation de Sèvres qui présente, à travers dix études de cas, les modalités et les difficultés rencontrées pour bâtir l’enseignement de l’Histoire. Soulignons d’emblée que le mot même « histoire » demeure toujours problématique en français, désignant tout à la fois le récit, la discipline scientifique, les faits donnés pour vrais, mais aussi le passé.
Entre ce qui a eu lieu, ce qu’il en est dit, ce qui est établi et ce qui doit être transmis, sans oublier ce qui doit être réexaminé, les confusions et les incertitudes sont grandes et sont d’actualité dans plusieurs pays, comme le montrent les pages qui suivent. Apprendre l'histoire, ça sert à quoi? « A quoi ça sert d’étudier ça?
» est un grand classique des cours d’histoire. Il ne se passe quasiment pas une année scolaire sans qu’au moins deux-trois élèves ne s’interrogent sur le sens de s’encombrer la tête avec ce genre d’enseignement. Personne ne les en blâmera puisque dans une société à caractère utilitariste comme la nôtre, même les adultes n’y croient pas. Nombreux sont les parents à relativiser les performances de leur progéniture dans cette discipline puisque « ça ne sert à rien ».
Pour tout dire, les grands penseurs du domaine éducatif se sont aussi posé la question. A titre anecdotique, il est spécifié dans le résumé édité du PER en matière de méthodologie que l'élève mène des enquêtes (2). Il semblerait que cette volonté de remplacer en partie les connaissances historiques au profit des compétences historiennes vise à faire de cette branche un "élément essentiel de la culture générale, à la citoyenneté, au développement de l'esprit critique" (4). « Ce que peut l’histoire », par Patrick Boucheron. Lors de sa leçon inaugurale au Collège de France, le 17 décembre, l’historien du Moyen Age, Patrick Boucheron, loin du déclinisme ambiant, invite lecteurs et auditeurs à chercher dans cet « art de la pensée » qu’est l’histoire des raisons d’agir et d’inventer d’autres horizons politiques et sociaux.
Extraits. Il y a un mois, je suis retourné place de la République. Comme tant d’autres, avec tant d’autres, incrédules et tristes. Le soleil de novembre jetait une clarté presque insolente, scandaleuse dans sa souveraine indifférence à la peine des hommes. Depuis janvier 2015, comme une houle battant la falaise, le temps passait sur le socle de pierres blanches qui fait un piédestal à la statue de Marianne. "A quoi sert l'histoire aujourd'hui ?", sous la direction d'Emmanuel Laurentin. LE MONDE | • Mis à jour le | Par Thomas Wieder Depuis 1999, Emmanuel Laurentin anime avec brio "La Fabrique de l'histoire", sur France Culture.
Fabrique ? Le terme, par l'imaginaire auquel il est associé, renvoie à l'univers du "faire", du "produire" et, partant, de l'"utile". Il était donc naturel que le journaliste finisse par demander à ses invités : "A quoi sert l'histoire aujourd'hui ? " Cette question, Emmanuel Laurentin reconnaît dans sa préface qu'il ne l'aurait sans doute pas posée il y a trente ou quarante ans, à l'époque où "l'histoire apparaissait comme une discipline reine, dominant les autres sciences sociales dans l'explication du monde". Aujourd'hui, Clio a tendance à se faire plus modeste. Cette inquiétude affleure dans la plupart des réponses collectées par Emmanuel Laurentin.
Essentiellement, rappellent plusieurs contributeurs, parce que l'histoire a trop souvent mal servi et trop rarement aidé à quoi que ce soit. "Imprévisibilité créatrice" Le récit concordant. Quelle définition donnez-vous à l’Histoire ?
Je n’ai pas toujours eu la même définition de l’Histoire. Elle évolue en fonction principalement de deux choses. D’abord, selon les propres lectures de l’historien, ses propres savoirs et aussi selon la conjoncture. La définition de la place de l’histoire et de l’histoire peut aussi évoluer selon le temps et le moment.
Il y a des moments où les usages du passé sont plus ou moins puissants, plus ou moins gênants et demandent parfois d’être plus présents dans l’espace public. On peut retenir à mon avis trois éléments.