#012 – Radicalisme temporaire. Ce qu’il y a de bien avec certaines soirées un peu improvisées, c’est que même si à la base tu n’en attends pas grand chose de plus qu’un bon moment, tu en repars avec un butin bien plus important.
Une idée. C’est ce qui m’est arrivé ce soir. Entre deux blagues sur le cul et trois sentences assassines sur l’état de la France, j’ai entendu un petit fragment de sagesse. Une phrase dont les mots exacts échappent à ma mémoire fébrile, mais qui disait à peu près cela : « Il faut pour quelques combats accepter l’idée d’extrémisme. » Nous parlions alors du viol, et du fait que même les blagues qui pouvaient sembler les plus inoffensives étaient inacceptables par les victimes, même des années après.
J’ai pour ma part toujours eu du mal avec les extrémismes, dans tous les champs de ma vie. Pourtant, et ça m’a frappé tout de suite dès cette phrase prononcée, je comprends l’idée qu’elle véhicule. Dans ces moments-là je me sens un peu inutile. On se réunit pour en parler ? J'aime : J'aime chargement… Je suis féministe et parfois, je me déteste. Quand j’ai entendu parler de féminisme pour la première fois, j’étais un peu perplexe.
Pas parce que je trouvais ces idées stupides, mais justement parce qu’elles me semblaient évidentes. Je trouvais ça étrange de faire autant cas d’idées somme toute plutôt logiques. Effectivement, quand on ne cherche pas bien loin, on s’arrête au « les hommes et les femmes sont égaux ». En y réfléchissant pas plus que ça, par rapport à ce qu’il se passait il y a ne serait-ce que cinquante ans, finalement on est plutôt pas trop mal loties en France. Féministe. Le prix à payer.
Imaginez un groupe de gens : vous pouvez choisir n’importe quel contexte socio-culturel, professionnel ou personnel, ça marche à tous les coups.
Imaginez donc, à votre guise, une manif, un milieu engagé, un collectif, une famille, un groupe de collègues, de potes, des couples, des forums, des sites, une association, des blogs, une émission de télé, de radio, un repas entre amis, bref des assemblées diverses, officielles ou non, IRL ou virtuelles. Visualisez une femme ou plusieurs dans ce groupe donné. Vous y êtes ? Ok. Maintenant, visualisez-la dans quatre situations précises de prise de parole, que cette parole soit orale et physiquement adressée au groupe ou écrite et mise en ligne face à ce groupe : – Elle est en train de contrer un argument sexiste/misogyne – Elle défend un argument féministe – En tant que féministe elle dénonce quelque chose – Elle dit simplement « Je suis féministe ». Le féminisme en milieu militant ? Être féministe en soirée… Être un OVNI Les féministes… (aïe quand on commence un article pas « les féministes » on perd déjà du monde)… Je disais, les féministes pourront vous le dire, il n’y a souvent rien de plus complexe à défendre que le droit des femmes autour d’un verre entre amis.
On dit même que si on sait le faire, on arrive, au final, à tout défendre. C’est vous dire si j’ai du boulot. Car comme l’a bien fait remarquer Eve Robert sur le blog Mauvais Genre (que j’ai découvert pour l’occasion), c’est loin d’être évident pour une femme de venir briser des millénaires d’idées reçues avec 3 grammes d’alcool dans le sang et un auditoire qui, (il faut être honnête), n’est pas spécialement venu pour prendre des leçons. Et pour un homme ? C‘est que ça demande un sacré travail sur soi le féminisme, tant nous sommes bourrés de petites habitudes sexistes auxquelles nous ne faisons plus vraiment attention. En arriver là… Bad-buzz-les-feministes-sont-elles. Quand on se revendique féministe et que l’on est, comme moi, plutôt active sur les réseaux sociaux, on est souvent confrontée à un dilemme face aux publicités sexistes : doit-on les dénoncer ou pas ?
Doit-on manifester son mécontentement ou le taire afin de ne pas faire de la publicité aux marques en question ? La question est complexe d’autant qu’il n’est pas toujours simple d’agir sur le moment avec recul et la tête froide. S’empêcher de réagir, comme beaucoup nous le recommandent voire nous l’ordonnent, c’est un peu la double peine : être choquée, humiliée mais devoir se taire et garder pour soi son ressenti.
Je dois avouer que ma position a évolué sur le sujet, en même temps que j’ai vu changer la façon de communiquer des marques. Au début de ce blog, il y a 4 ans de cela, la dénonciation des publicités sexistes faisait clairement partie des sujets que je traitais systématiquement.