Buresi P. et El Aalaoui H., Gouverner l’empire. La nomination des fonctionnaires provinciaux dans l’empire almohade. Accès LIBRE
1 Cette partie couvre les p. 223-477 du volume. 1L’ouvrage, fruit de l’habilitation à diriger des recherches de Pascal Buresi (PB), repose d’abord sur la réédition et la traduction en français par PB et Hicham El Aalaoui (puis en anglais par Travis Bruce) d’un recueil de lettres de la chancellerie almohade, le Majmūʿ Yaḥyā, conservé dans le manuscrit 4752 de la Bibliothèque Ḥasaniyya de Rabat1. Aḥmad ‘Azzāwī (1995) en avait déjà fait une édition dans les années 1990, dans le cadre de son recueil de lettres almohades, mais en dépit de la grande qualité de cette édition, les auteurs ont jugé utile de reprendre le travail pour deux raisons principales. 2Ce travail d’édition et de traduction permet à PB de mener une enquête sur les structures de gouvernement de l’empire almohade, qu’il développe en deux temps. 2 D’utiles notes infrapaginales dues à Mehdi Ghouirgate apportent en outre régulièrement des compléme (...)
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Les conflits qui imprégnèrent l’histoire du Proche-Orient médiéval, des croisades aux invasions mongoles, rendirent nécessaire la présence de guerriers au cœur du pouvoir. Les Mamelouks, esclaves militaires, affranchis pour accéder au titre d’émir, gouvernèrent l’Égypte et la Syrie, à partir de 1250, avec le titre de sultan, et furent de ceux qui défendirent le monde musulman contre les périls du temps. En cela réside le difficile enjeu du présent ouvrage : saisir, de façon aussi fine que possible, au-delà de la distinction et des rapports de domination, les modalités de cette longue coexistence, et étudier, comprendre et restituer la complexité des interactions et des relations que Mamelouks et élites civiles et religieuses ont su tisser entre eux. Pour ce faire, cette étude se concentre sur le règne des sultans turcs (1250-1382), la Dawlat al-Atrāk.
Entretien avec E. Vallet pour introduire la question « Gouverner en Islam entre le Xe siècle et le XVe siècle (Iraq jusqu'en 1258, Syrie, Hijaz, Yémen, Égypte, Maghreb et al
Quelle période ? Le choix des bornes chronologiques délimitant un programme comporte toujours une part d’arbitraire. La période choisie ici est très large, puisqu’elle couvre six siècles d’histoire. Cela a été imposé par la thématique : celle-ci met l’accent non pas sur une histoire événementielle ou sur une histoire dynastique qui serait à traiter dans les menus détails, mais sur l’exercice du pouvoir, et sur la manière dont il est perçu, décrit, théorisé. Le programme s’ouvre sur le Xe siècle, c’est-à-dire au moment où la crise du califat abbasside devient une crise ouverte, avec l’apparition de califats rivaux (le califat fatimide en 909, et le califat des Omeyyades de Cordoue en 929). Quels territoires ? Le sujet invite les candidats à ne pas se limiter à l’étude d’une seule région, mais à pratiquer plutôt une forme de comparatisme large au sein du monde arabe. Cet espace est loin d’être figé dans des frontières immobiles au cours de la période. Les sources à prendre en compte
La chute de Bagdad en 1258 : entre l’événement historique et ses symboliques (1)
La région passe ensuite durablement sous une domination mongole et turque, dont la langue de gouvernement est le perse. 1258 marque en effet la chute non seulement de la capitale abbasside, mais par elle également de tout le califat qui depuis 762 avait établi le centre de son pouvoir à Bagdad. C’est donc une rupture géopolitique majeure, que Thierry Banquis souligne comme telle dans son article « Méditerranée arabe, Asie musulmane, où passe la frontière ? ». En effet, si en 1258 l’Iraq passe sous une domination mongole, l’Egypte devient le centre de l’espace musulman sunnite arabophone, établissant d’ailleurs un calife au Caire, bien que celui-ci n’ait qu’un pouvoir religieux. Le siège et la chute de Bagdad s’inscrivent dans l’histoire de l’expansion mongole : en effet, à partir de 1206, Gengis Khan constitue l’Empire mongol en un Etat fort, entreprenant de nombreuses conquêtes. Si ce débat peut sembler très restreint, il rejoint néanmoins des enjeux beaucoup plus vastes. Notes :