L'invention de l'hétérosexualité La culture hétérosexuelle n’est qu’une construction parmi d’autres. Si elle domine dans les représentations des sociétés occidentales, elle n’est ni forcément naturelle ni universelle. Depuis des siècles, des milliers d’ouvrages ont été consacrés au mariage, à la famille, à l’amour ou à la sexualité des hétérosexuels. En fait, l’hétérosexualité en tant que telle n’apparaissait guère dans ces écrits, en général point de vue, donc point aveugle de toute vision. Pourtant, le monde qui nous entoure est tout entier obsédé par l’imaginaire du couple hétérosexuel : les contes de l’enfance, les romans des adultes, le cinéma, les médias et les chansons populaires, tout célèbre à l’envi le couple de l’homme et de la femme. Sur l’hétérosexualité, les questions les plus simples n’ont guère été posées. L’hétérosexualité est-elle naturelle ? Mais cette explication n’est guère satisfaisante. L’hétérosexualité est-elle universelle ? Les sociétés humaines sont-elles toutes hétérosexuelles ? À savoir J. J.
Boris Cyrulnik : stop ou encore ? (1ère partie) Dans une récente pastille radiophonique, la distorsion de la réalité opérée par le célèbre médecin a atteint des proportions record. Cette nouvelle prouesse amène à lever le voile sur un trompe-l’œil dont l’étendue et la persistance ne laissent pas d’étonner. Les implications politiques de ses opinions, massivement diffusées sous les atours d’une parole de sagesse pétrie de science et d’humanisme, sont suffisamment sérieuses pour qu’on s’y penche. Depuis plusieurs années, Boris Cyrulnik dispose d’une carte blanche dominicale bimensuelle sur une radio du service public, via la pastille radiophonique « Histoire d’Homme » de France Info. Multi-diffusée (six fois le dimanche concerné) sur cette radio qui jouit d’une très grande audience [1], sa chronique est également accessible en ligne à tout moment. L’expert tout-terrain est censé rien moins qu’y « expliquer les comportements de société liés à des sujets d’actualité » [2]. « Le cerveau a-t-il un sexe ? « On » est un con Odile Fillod
Le genre n'est pas une théorie, c'est un fait Le genre n'est pas une théorie : c'est un fait. Cette formule, j'ai eu l'occasion de l'utiliser dans des billets précédents. Et j'ai dû souvent la marteler à nouveau contre les néo-réactionnaires qui se sont fait un devoir de continuer leur lutte contre l'égalité en la rhabillant "lutte contre la théorie du djendeur". Il n'est pas forcément facile de le montrer : un fait ne se donne pas à voir immédiatement. Considérons maintenant un autre point : puisque je sais que la Terre est ronde, je peux avoir envie de savoir pourquoi. Je peux montrer que les corps chutent dans certains contextes. Pour que les choses soient plus claires, considérons un autre cas : l'évolution. Mais dire "les espèces évoluent" ne nous dit rien du pourquoi et du comment de ces évolutions. Les spécialistes de physiques et de biologie évolutionniste trouveront sans doute ma présentation schématique. Venons-en au genre enfin. Et c'est cela le genre. Si certains veulent contester ce fait, c'est toujours possible.
"Sexes et races, deux réalités": une réponse à Nancy Huston et Michel Raymond La romancière Nancy Huston et Michel Raymond, "spécialiste de biologie évolutionniste", ont publié le 17 mai dans Le Monde une tribune intitulée "Sexes et races, deux réalités". La première a publié récemment un ouvrage qui se veut une charge contre la fameuse "théorie du genre": Reflets dans un oeil d’homme (Actes Sud, 2012). Son cheval de bataille: la reconnaissance du déterminisme biologique façonnant notamment les comportements sexuels des hommes et des femmes, qui serait nié par le genre, présenté comme une idéologie. Grossièrement exprimé, les jeunes femelles humaines tout comme les guenons tiennent à séduire les mâles, car elles veulent devenir mères. Elle s’appuie notamment sur les thèses de la psychologie évolutionniste, dont Michel Raymond (co-auteur de la tribune) est un représentant. Il est important de commencer par cette mise au point pour situer la tribune publiée par Le Monde. L’opposition entre faits naturels et idéologie L’idée de nature et la force de l’évidence
airagorncharda: This hit me like a ton of... PMA, homoparentalité, filiation : A propos de la pensée réactionnaire de quelques écologistes Dans son numéro d’été 2013 la revue L’écologiste publie un article qui s’inscrit dans le débat sur la loi Taubira et « les enjeux sur la filiation ». Ce texte d’Hervé Le Meur, militant écolologiste, dénonce les prétendues dérives de la possible extension aux homosexuel.le.s de l’aide médicale à la procréation – plus connue sous le sigle PMA. Celle-ci aurait pour lui comme conséquence de bouleverser la filiation « naturelle » et les « fondements de la maternité ». Sous le titre choc « De la reproduction artificielle de l’humain », PMO, un collectif d’opposition à la tyrannie technologique a de son côté décidé de relayer largement ce texte sur Internet. La rhétorique est séduisante. En finir avec l’idée de Nature L’auteur pense que « tout écologiste garde une certaine tendresse pour tout ce qui est naturel ». Dans un premier temps, il faut donc rappeler que la Nature n’existe pas. L’idéologie naturaliste est bien l’ennemi de l’émancipation et de l’égalité. Mentirait-on aux enfants ?
Déconstruction de l’idée de nature dans les rapports sociaux "Si le patriarcat existe, c'est qu'à la base les hommes sont plus forts physiquement que les femmes ; ils les ont donc dominés et cela a commencé cela". Je ne compte plus les fois où j'ai entendu cette hypothèse naturaliste. Hypothèse qui tend à transformer des rapports sociaux en des rapports naturels (= dûs à la nature), ce nouveau dieu qui régit les rapports humains et qui, comme le dit Colette Guillaumin, "va jusqu'à organiser des programmes génétiques spéciaux pour ceux qui sont socialement dominés". Nous ne savons rien de la force physique des hommes "à la base". que le dimorphisme sexuel, l'ensemble des différences morphologiques entre les individus mâle et femelle d'une même espèce, est difficile à établir quand on dispose de très peu de squelettes entiers pour une période donnée. montre que le dimorphisme sexuel, lorsqu'il existe, est dû à la sélection intrasexuelle entre mâles et non pas à la sélection intersexuelle. Si les dominés sont dominés c'est qu'ils sont différents.
La volonté de parler à tout prix de race Quand les adversaires d'un ensemble de travaux scientifiques portent leur polémique en dehors du monde scientifique, il y a toujours de quoi s'inquiéter. Pas d'exception pour les travaux sur le genre, avec un nouvel exemple avec . Sans surprise, il apparaît clairement que les auteurs ont d'autres choses en tête que le simple questionnement scientifique qu'ils prétendent affirmer. Pourquoi ? Parce que sur le plan strictement logique, leur argumentation ne tient pas : si "sexes" et "races" désignent des classes logiques, ce n'est pas ce qu'ils montrent ici. Si vous affirmez l'existence chez les humains de deux sexes, plutôt que d'un seul ou de toute une kyrielle, vous êtes aussitôt taxé d'"essentialisme". Des faits donc, qu'on vous dit, des faits ! Commençons par le critère le plus mal choisi : "les hommes ont en moyenne un niveau de testostérone plus élevé que les femmes". Prenons un exemple pour être plus clair. Reste le deuxième critère cité : le fait d'avoir ou non un utérus.
L'essence du néolibéralisme, par Pierre Bourdieu Le monde économique est-il vraiment, comme le veut le discours dominant, un ordre pur et parfait, déroulant implacablement la logique de ses conséquences prévisibles, et prompt à réprimer tous les manquements par les sanctions qu’il inflige, soit de manière automatique, soit — plus exceptionnellement — par l’intermédiaire de ses bras armés, le FMI ou l’OCDE, et des politiques qu’ils imposent : baisse du coût de la main-d’œuvre, réduction des dépenses publiques et flexibilisation du travail ? Et s’il n’était, en réalité, que la mise en pratique d’une utopie, le néolibéralisme, ainsi convertie en programme politique, mais une utopie qui, avec l’aide de la théorie économique dont elle se réclame, parvient à se penser comme la description scientifique du réel ? Cela dit, cette « théorie » originairement désocialisée et déshistoricisée a, aujourd’hui plus que jamais, les moyens de se rendre vraie, empiriquement vérifiable.