L’art français de la déviance policière « Négro, bamboula, salope » : la violences des assignations raciales et sexuelles prononcées par les policiers qui ont interpellé Théo, 22 ans, résidant à la Cité des 3000, le 2 février 2017 à la suite d’un contrôle d’identité, s’est accompagnée d’un tabassage à coup de poings, de pieds et de matraque télescopique. Cette dernière a également été utilisée pour provoquer une « grave blessure rectale » constatée par un médecin de l’hôpital Robert-Ballanger à Aulnay. À la violence verbale et physique s’ajoute donc un viol commis avec une arme de service [1]. Sans ambigüité, la force, la soumission et la dégradation se sont substituées au droit. Dans les jours qui suivent, une procédure judiciaire est engagée, tandis qu’à Aulnay et dans d’autres communes alternent émeutes et mobilisations pacifiques organisées par les proches du jeune homme et des collectifs mobilisés contre les violences policières. Fait inhabituel, l’affaire est également rapidement relayée dans le champ politique.
6. Ils ont osé ! - par Olivier Long, enseignant-chercheur Ils ont osé s’attaquer au défilé du 1er mai. En dehors de l’intox gouvernementale qui tourne en boucle sur Rance 2 (les jeunes sont des casseurs, la manif a été peu suivie, le pays aime la loi travail et ça ne dérange personne d’être obligé de travailler 60 heures par semaine, même si c’est illégal selon les règlementations européennes) la réalité est là : le gouvernement de François Hollande est le premier a avoir fait du défilé du 1er mai une souricière pour les travailleurs. Depuis Nicolas Sarkozy la méthode est bien connue, on nasse deux cents personnes dans une souricière, on les fait patienter pour créer un effet de claustration, à la première crise de panique, on gaze copieusement la foule. Tout le monde est alors chargé dans un bus après avoir été tout aussi copieusement rossé. Que s’est-il passé hier à Paris ? C’est là que la préfecture de police a décidé de mettre en œuvre une stratégie innovante. Le problème c’est que cette géniale tactique préfectorale a fait bouchon.
"Envoyé spécial". "Nous sommes tous des casseurs" On les a vus à l’œuvre à Nantes les 25 et 26 février derniers, manifestant violemment contre la venue de Marine Le Pen, affrontant les forces de l’ordre et détruisant des vitrines de banques : les fameux "casseurs", comme les appellent les médias et bon nombre de dirigeants politiques. Ce sont des groupes de militants d’extrême gauche tous vêtus de noir, qui s’en prennent aux symboles du capitalisme et à la police. Des "Black Blocs", selon le terme employé par les spécialistes. En France, ils sont apparus massivement au printemps 2016, lors du mouvement de contestation de la loi Travail. Qui sont ces activistes radicaux ? Un film réalisé par Thierry Vincent et produit par Sekhoya Production (rédaction en chef Emmanuel Charlot) avec Mathieu Huou, Richard Michel, Jean-Pierre Vesperini, Charles Baget, Charles Maumy, Fatima Hallassi et Stéphane Huonnic, diffusé en exclusivité sur Franceinfo.
La fabrique de la violence « La puissance qui s’acquiert par la violence n’est qu’une usurpation et ne dure qu’autant que la force de celui qui commande l’emporte sur celle de ceux qui obéissent » Denis Diderot, L’Encyclopédie, Article « Autorité politique » C’est à Paris, Boulevard Diderot , que des enfants, des jeunes et des personnes âgées ont été gazés par des CRS, auxquels l’ordre a été donné d’intervenir en milieu de défilé pour séparer les manifestants pacifistes des supposés « casseurs ». C’est à Paris, Boulevard Diderot, qu’un Préfet de police a décidé de positionner de nombreux CRS, bien visibles, dès le premier tiers du parcours, dans des rues adjacentes, et au sein même du cortège. Cette logique de la provocation repose, il me semble, sur trois techniques, exemplairement mises en œuvre ce 1er mai à Paris : l’interruption, la nasse et la terreur. Cette logique devient dans les médias une rhétorique de la peur. © Simon Guillemin Nos concitoyens ne doivent pas se laisser abuser. Pascal Maillard
Des massacres oubliés de mai 1967 en Guadeloupe aux prémices de l'ordre sécuritaire moderne dans les quartiers - Basta ! C’est une commémoration méconnue : il y a 50 ans, les 26 et 27 mai 1967, la police et l’armée françaises réprimaient brutalement des manifestations ouvrières et lycéennes en Guadeloupe. Alors que Pointe-à-Pitre se révolte, les forces de l’ordre se livrent à un massacre qui fait au moins 8 morts selon les sources officielles. Des recherches approfondies démontrent qu’un modèle de contre-insurrection a été expérimenté sous l’autorité d’un préfet, Pierre Bolotte. Formé en Indochine puis en Algérie, il deviendra le premier préfet de la Seine-Saint-Denis et l’architecte d’une nouvelle forme de police, inspirée de ce modèle colonial et militaire. Enquête aux sources de l’ère sécuritaire. Les 26 et 27 mai 1967, l’Etat français encadrait le massacre de révoltes populaires en Guadeloupe. Une guerre anti-subversive forgée en Indochine Entré dans le corps préfectoral en 1944, sous l’occupation nazie, Pierre Bolotte est reconduit à son poste après la Libération. Une méthode systématisée en Algérie
Qui est responsable des violences policières ? L’arrêt de mort du code de déontologiepar Dominique Noguères Avocate et membre du comité central de la Ligue des droits de l’homme Un peu partout en France, depuis le début du mouvement contre la loi travail, des incidents violents impliquant les forces de police se sont multipliés, dans une escalade inquiétante. D’abord ciblées sur des jeunes lycéens qui manifestaient, ces violences se sont étendues aux rassemblements de Nuit debout et aux manifestations syndicales et associatives. Les témoignages sont hélas nombreux. Ils mettent en évidence les coups portés à des personnes déjà entravées ou l’utilisation de balles de défense, causant jusqu’à la perte d’un œil. La mission de la police est, à l’origine, d’adapter le maintien de l’ordre à la liberté de manifester. Les violences émanant des éléments les plus radicaux infiltrés dans les manifestations devraient être réprimées par la police, qui doit protéger les manifestants. Dans le cas des manifestations, le contexte est différent.
Mathieu Rigouste, La domination policière, une violence industrielle 1 Stephen Graham, Villes sous contrôle : la militarisation de l’espace urbain, La Découverte, Paris (...) 1Comment la violence policière est-elle encadrée, orientée et utilisée ? Quels en sont les objectifs et à quelles fins est-elle utilisée ? Quels mécanismes sociaux sont engendrés par celle-ci ? C’est ce que Mathieu Rigouste propose d’analyser de manière très précise dans son ouvrage. En décrivant rigoureusement l’histoire des pratiques policières dans certains quartiers populaires qui découlent de logiques politiques, économiques et médiatiques depuis les années 1970, il dénonce un système de ségrégation endocolonial néolibéral français. 2L’auteur développe sa théorie de l’industrialisation de la violence policière envers les « damnés de l’intérieur » au long de sept chapitres complémentaires. 3À travers son livre, on découvre également une vision de l’histoire de la mise à l’écart de certains quartiers et populations au cours du XXe siècle.
Loi travail : panique au sommet Hier encore, ils affichaient leur morgue et leur arrogance. Vous refusiez la loi travail ? Une lubie liée à une altération du jugement, on allait donc vous ré-ex-pli-quer la modernité, le réel. Dans les cercles du pouvoir, on ne se reconnaissait qu’une seule faute, le manque de pédagogie. On serre les rangs Avec la grève des raffineries, le blocage des dépôts d’essence, les grèves à répétition qui ne faiblissent pas, changement de ton : fini le temps du mépris, place au déluge de haine. C’était le 19 avril : le patron du Medef fustigeait alors « une loi vidée de son sens » et annonçait que les patrons avaient atteint « leur point de rupture ». Terrorisme, sabotages et guerre civile Mais c’est surtout du côté des médias que le changement est le plus net. Tout y passe, et le vocabulaire est un peu étrange, surtout après les attentats de 2015 (une collection de perles à lire ici ou encore là) : « La radicalisation de la CGT pose incontestablement un problème », nous déclare Manuel Valls.
Face à la police / Face à la justice Le guide d’autodéfense juridique, paru pour la première fois en 2007, a été repris, actualisé et augmenté par le collectif CADECOL (Caisse de défense collective). Quels sont mes droits lors d’une garde à vue ? Suis-je obligé de donner mon ADN ? Pour répondre à ces questions et à bien d’autres, Face à la police/Face à la justice propose une vue d’ensemble des procédures pénales courantes. Face à la police/Face à la justice n’imagine pas que la procédure pénale soit une garantie pour celles et ceux qui se sont fait arrêter. Face à la police/Face à la justice, guide de d’autodéfense juridique est ici la version intégrale du bouquin paru aux éditions Syllepse en 2016.
Ces images qui attisent la colère La scène est quasi immuable. À chaque fois que les forces de l'ordre chargent, sortent les matraques, dégainent gaz lacrymogènes et grenades de désencerclement, une nuée de smartphones et de caméras s'immisce dans le décor. Depuis le début des manifestations contre la loi sur le travail, à Paris comme dans plusieurs villes du pays, on ne compte plus les vidéos amateurs et semi-professionnelles qui documentent les violences policières. Ces témoignages bruts, abondamment relayés et commentés sur les réseaux sociaux, suscitent l'indignation, entretiennent le souffle de la mobilisation et peuvent même, en cas d'enquête, servir de preuves solides : la police des polices a ainsi été saisie, le 24 mars, suite à une vidéo virale, montrant un agent asséner un violent coup de poing à un lycéen de 15 ans. La rédaction de Mediapart a sélectionné vingt-et-une séquences, rassemblées dans la mosaïque ci-dessous.
Retour sur la récente flambée sécuritaire, réactionnaire et raciste à Belleville Le 20 juin 2010, avait lieu dans le quartier de Belleville (Nord-Est de Paris) une manifestation pour la « sécurité », organisée par diverses associations censées représenter la « communauté asiatique » pour demander aux autorités le renforcement d’un arsenal répressif qui nous pourrit déjà la vie (plus de flics, de caméras, de sanctions etc.). Durant cette manifestation, des échauffourées ont éclaté dans le quartier entre des centaines de manifestants contre la police, accusée de mal faire son travail, puis après le départ programmé de celle-ci, contre quelques gamins isolés et identifiés par la vindicte populaire comme des « voleurs » à punir par des critères tels que la tenue vestimentaire et la couleur de peau. Les quelques textes recueillis ici sont des analyses de la situation dans le quartier, sur fond de tensions communautaires, ainsi que des tracts et affiches diffusés et collées aux alentours par quelques anarchistes antagonistes.
« Pourquoi, dès que la victime est policier, y a-t-il deux poids, deux mesures ? » Par Noël Mamère, Olivier Besancenot, Annick Coupé, Jean-Baptiste Eyraud Les faits sont têtus. Le 18 mai, une voiture de police est incendiée par des manifestants. Une vidéo montrant des individus non identifiables tourne en boucle sur les chaînes d’information en continu. Comme le soulignent leurs avocats, le dossier est totalement vide, et aucun élément objectif n’indique leur participation aux faits incriminés. Farce honteuse Un tollé s’ensuit dans les médias, animé par le syndicat policier Alliance, le même qui avait organisé la manifestation de la police ce même 18 mai sur la place de la République. La question posée est donc simple : pourquoi dès qu’il s’agit d’actes dont les victimes sont des policiers, y a-t-il deux poids, deux mesures ? Cette farce honteuse pour le pouvoir politique et les syndicats de policiers est le produit de plusieurs facteurs : Des militants stigmatisés et dépersonnalisés Une justice indépendante est garante de la démocratie.