Un bon usage de la notation est-il possible ? Faut-il renoncer aux notes, comme s'y essaient quelques établissements expérimentaux ? Ni l'institution, ni ses acteurs n'y semblent prêts. Ce qui n'empêche pas d'examiner les pratiques réelles, de les comparer avec celles d'autres systèmes scolaires, de juger si certaines semblent mieux adaptées à l'apprentissage et à la réussite scolaire. Pierre Merle, sociologue, agrégé de Sciences économiques et enseignant à l'ESPE de Bretagne intervenait le 30 avril 2014, dans le cadre des Mercredis de Créteil du CNDP, à l'occasion du cycle « Pour une école bienveillante : renforcer le plaisir d'apprendre » pour une réflexion sur la Notation des élèves : état des savoirs et « pratiques efficaces ». Il entendait montrer que certaines données sont à prendre davantage en considération : renoncer à l'idéal de la note « vraie », admettre la réalité des « biais » d'évaluation qui influent sur les notes, mutualiser et varier les formes d'évaluation pour atténuer leurs effets pervers. Jeanne -Claire Fumet
Evaluations. Enfin ! Le ministre a enfin décidé de libérer les enseignants, et les élèves, et les parents, du syndrome de l’évaluationnite aigue. Il y a bien longtemps que je plaide pour une remise à plat de cette question complexe. Non pas qu’il ne faille pas évaluer comme m’en accusent mes détracteurs les plus obtus. Mais il faut, de l’avis de tous les pédagogues sérieux non conquis par le stupide pilotage par les résultats, Mettre les pratiques en concordance avec les finalités du système, pas seulement avec les programmes disciplinaires juxtaposée, à court terme Faire une véritable évaluation et la distinguer clairement du contrôle. La remise à plat est à faire d’urgence car l’évaluationnite liée au pilotage par les résultats est un des facteurs majeurs de la destruction de l’école, bien engagée depuis une dizaine d’années au moins, et considérablement accélérée en 2007. Aujourd’hui, la continuité sera plus difficile à imposer. Pierre Frackowiak Crédit photo : Jacques Risso
L'évaluation des apprentissages dans une approche par compétences - Gérard Scallon Pierre Merle : L'échelle de notation des élèves : un faux problème ? Dans son discours de clôture de la Conférence nationale sur l'évaluation des élèves, Étienne Klein, le président du jury, a avancé une affirmation pour le moins surprenante : « La question du système de notation sur laquelle on ne cesse pas de m'interroger depuis deux jours - Est-ce que nous allons proposer de remplacer l'échelle de 0 à 20 par 4 à 20 ou par 8 à 20 ou par ABCDE ? - est un faux problème (…) puisque tous ces systèmes sont convertibles les uns dans les autres et, en tant que physicien, je puis témoigner du fait qu'on ne change pas la nature d'un problème par un changement de variables. » Cette affirmation qui ne semble souffrir d'aucune contestation, puisque semble-t-il confortée par l'expérience du physicien spécialiste de la philosophie des sciences, pose plusieurs problèmes. Le savant et le populaire Le premier problème soulevé par l'affirmation d'Étienne Klein tient au fait que l'échelle de notation fait clairement débat dans l'opinion. Pierre Merle Notes :
Socle Commun de Connaissances et de Compétences Il s’agit en fait de distinguer différentes langues : la langue dont l’élève fait un usage privé, la langue de l’école, la langue des écrivains. Un élève est confronté tout au long de la journée à des discours très différents : discours commun d’un côté, discours professionnels de l’autre ; le problème est donc de l’aider à comprendre à quel moment les termes employés sont à comprendre dans un sens commun, à quel moment ils relèvent d’une acception disciplinaire précise et scientifique. La langue de l’école se décline de surcroît en langages scolaires différents selon les disciplines ; en pratique, chaque enseignant fait un usage implicite des langues spécifiques, ce qui induit souvent des interprétations fautives pour l’élève. On constate en effet que l’usage de mots du vocabulaire courant dans des sens scolaires spécifiques, que l’emploi des mêmes mots avec des sens différents selon les disciplines sont une source de troubles et de confusions.
Notes et compétences, quelle équation ? C'est une question qui agite la salle des profs, à l'heure de la mise en oeuvre du socle commun. J'émets l'hypothèse de l'incompatibilité. La note sur 20 permet, à travers l'exemple de la dictée, de sanctionner les fautes. On peut rétorquer que dans les multiples évaluations notées, les points sont comptés en positif : on pointe les réussites des élèves par un point, qu'on pourra d'ailleurs décliner jusqu'au quart de point selon le degré d'approximation de la formulation de l'élève. Retirer un demi ou un quart de point sur une question permet de signifier à l'élève que sa réponse n'est pas parfaite, mais qu'elle comprend tout de même un élément de réponse positif. Si l'on se penche sur les moyennes (obtenues par de savants calculs coefficientés), ce "réel" est biaisé. Ces constantes s'expliquent par des mécanismes protecteurs de la part du professeur, obnubilés tant par la réussite des élèves, que par la moyenne que l'on présente en conseil de classe.
www.ipp.eu/wp-content/uploads/2014/12/n14-notesIPP-decembre2014.pdf L’évaluation par ceintures, inquiétant ou rassurant ? Depuis trois ans, Emmanuel Picart se demande à chaque réunion parents-profs si certains vont lui tomber dessus pour lui reprocher les ceintures. A chaque fois, l’inverse se produit... Tous les ans, des collègues s’inquiètent pour moi, craignant une réaction négative des parents qui n’accepteraient pas que leur enfant ne soit pas noté « sur sa copie ». Je dis « sur sa copie » car, dans mon système d’évaluation par ceintures, je mets une moyenne trimestrielle (étant le seul professeur du collège à travailler de la sorte, je dois remplir les bulletins comme les autres). Ces parents, dont on aurait tant à craindre les foudres, sont souvent surpris en début d’année quand leur enfant leur explique le principe de l’évaluation par ceinture. D’abord surpris, puis rassurés car ils voient une motivation chez leur enfant, une volonté de « réussir la ceinture ». Je dois avouer que souvent, lorsque j’entends ces propos, je suis moi-même surpris.
Ces collèges qui ont supprimé les notes... Par François Jarraud Critiquées de toutes parts, les notes n'ont plus la cote. Mais ce n'est pas pour autant que l'approche par compétences séduise les enseignants. "C'est une enseignante de passage dans l'établissement qui a lancé l'idée", explique Jean-Claude Rogeon, principal du collège Guiton à La Rochelle. Pourquoi avoir fait ce choix ? Pourtant ces équipes se sont heurtées à des résistances. Dans la réussite de ces projets, le rôle de l'encadrement semble essentiel. Reste le bilan. François Jarraud Liens : Le dossier de Surgères Un dossier du Café Sur le LPC
Puisqu’on vous dit que la note, ce n’est pas le problème ! L’apparition du socle commun de connaissances et de compétences a introduit, avec le livret personnel de compétences, une « nouvelle » façon d’évaluer au collège, qui, si elle a pu jeter le trouble, a alimenté le débat sur l’évaluation des élèves. La refondation de l’école s’est donnée pour objectif de renouveler le socle commun et d’aller vers une évaluation positive des élèves. Le Conseil Supérieur des programmes travaille à cette rénovation, où la question de l’évaluation est capitale. Noyer le poisson Les opposants à l’évaluation des compétences, comme les syndicats du SNALC et du SNES, présentent constamment des arguments qui jouent du même registre : Des notes dont on fait… des moyennes Mais bizarrement sur ce point, les partisans de la note négligent systématiquement la question des moyennes trimestrielles. La consultation de l’ensemble des bulletins trimestriels (traditionnels) d’une classe sur une année est à ce titre éloquente. Pourquoi revoir l’évaluation des élèves ? Like this:
La tablette tactile, un outil précieux pour des élèves déficients visuels - Centre de documentation pédagogique de l'Oise Le collège Fernel à Clermont dans l’Oise possède une classe ULIS TLV (Unité Localisée pour l’Inclusion Scolaire - Trouble de la Fonction Visuelle) dont s’occupe Maud Védérine, enseignante spécialisée. Laetitia, Marianne, Lionel, élèves malvoyants et non-voyants de cette section passent quelques heures par semaine entre ses mains (braille, informatique spécialisé, techniques palliatives et étayage). Le reste du temps, les élèves sont en classe avec leurs camarades, en inclusion totale. Ils passeront le brevet des collèges comme tout le monde avec ses quatre épreuves : français, maths, histoire et histoire des arts. Comment faire passer à des élèves déficients visuels l’épreuve d’histoire des arts ? Les nouvelles technologies peuvent apporter une réponse. En amont, des images et leurs commentaires pédagogiques sont réalisés, avec la collaboration des enseignants d’accueil, sur la fonction "monteuse" de la tablette.
Les pré-requis à la suppression des notes Les expériences de suppression des notes dans des classes de collège ont tendance à se multiplier ces dernières années. Il me semble qu'au delà d'un travail militant, effectué sur le terrain par des personnels de direction et des enseignants conscients des enjeux de la question, cette tendance ait été renforcée par la mise en place en 2005 d'un droit à l'expérimentation dans le cadre de l'article 34 de la loi d'orientation. Sur la question de la suppression des notes, l'innovation "institutionnelle" et l'innovation "de terrain" peuvent donc se rencontrer, et cette double paternité est souvent un gage de réussite. Mais la volonté ne suffit pas toujours. J'ai moi même accompagné, à la direction d'un collège d'Indre-et-Loire, une expérimentation de suppression de notes dans un cours de mathématiques de 4e. - Un chef d'établissement qui impulse, ou qui aide à la mise en oeuvre si l'impulsion vient d'un enseignant ou d'une équipe. - Une progressivité dans la mise en oeuvre.
Deux ans sans notes au lycée. Un bilan Peut-on abandonner les notes au lycée ? Une année d'examen ? Célia Guerrieri, une jeune professeure de lettres, fait le bilan de deux années d'expérimentation en première. "La note est devenue utilitaire pour une grande majorité d’élèves, et non pas le simple constat qu’elle devrait être pour permettre de progresser. Cette dimension utilitariste m’a semblé parfois aller de pair avec un désintérêt pour la matière", nous dit-elle. "Les notes et les classements sont toujours une erreur"(1) : quel constat, dans vos pratiques, vous a incitée à tenter l'expérience du sans-note ? Je suis TZR, et au fil des années et de mon expérience dans des établissements très différents, je me suis rendu compte de ce qui était, pour moi, un invariant : les notes étaient rarement ce qui permettaient aux élèves de progresser. De très nombreux élèves ne produisaient leur devoir que pour la note qu’ils allaient obtenir et non pas pour connaître leurs acquis et leurs objectifs de travail. Pierre Estrate Notes :