Décapitation de Hervé Gourdel : ne me demandez pas de m'excuser au nom de l'islam Hervé Gourdel, Français enlevé et tué en Algérie par un groupe djihadiste lié à l'Etat islamique (capture d'écran vidéo/SIPA) Hervé Gourdel nous a quittés, puisse son âme reposer en paix. Lorsque je dis "nous", je parle en tant que français, en tant que musulman et avant tout en tant qu’être humain. Mais dans cette multitude d’appartenances, j’ai du mal à savoir laquelle est principale coupable d’un tel drame. Ne me demandez pas de m'excuser en tant que musulman En vouloir à ses ravisseurs qui l’ont décapité ? Alors s’il vous plaît, amis, collègues de travail et voisins, ne me priez pas de m’excuser "au nom de l’islam" pour leurs agissements. Si cette décapitation m’horripile et me désole, c’est avant tout en tant qu’humain. J’en veux aussi à ceux qui croient rétablir la grandeur de l’islam dans le sang et l’horreur. J'en veux aussi aux États-Unis et à la France J’en veux tout autant aux Etats-Unis qui ont mis l’Irak à feu et à sang. Pendant ce temps, les Arabes restent les bras croisés
Gaza avant le Congo ? La Palestine avant la Syrie « Si un mort israélien vaut plusieurs morts palestiniens, combien faut-il de cadavres congolais pour un linceul gazaoui ? C’est un bête entrefilet de quelques lignes, une dépêche AFP que personne ne s’est donné la peine de réécrire ou de compléter. […] 271 personnes auraient été tuées depuis le 25 décembre 2008 en République démocratique du Congo par les hommes de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA en anglais), un groupe venu d’Ouganda et en route pour la République centrafricaine. » Lire « Gaza l’insoumise, creuset du nationalisme palestinien », et « Une question d’“équilibre” » dans Le Monde diplomatique d’août 2014, en kiosques.Voilà ce qu’écrivait le journaliste Hugues Serraf durant l’attaque israélienne contre Gaza. L’interrogation est légitime, même si la conclusion est problématique : La place de la Palestine au coeur de la Terre sainte et d’un Proche-Orient riche en pétrole explique, en partie, le fait qu’elle ait souvent occupé, au moins depuis 1967, la Une de l’actualité.
Comment devient-on terroriste ? Qui sont les terroristes ? Quelles sont les conséquences de leurs actes sur la population des pays visés ? Une revue de psychologie sociale (1) a réuni une série de comptes rendus de recherches menées sur ces sujets, en se concentrant sur le terrorisme international. D’abord, qu’appelle-t-on « terrorisme » et « terroriste » ? Cela n’est pas évident, estiment des chercheurs de l’université de Bologne, citant une étude de 1988 qui recensait déjà 109 définitions différentes ! "Ni déprimés, ni très perturbés" Qui devient terroriste, comment et pourquoi ? Ainsi Nicole Tausch et ses collaborateurs (2) s’interrogent-ils sur les facteurs associés, chez les musulmans anglais, à une vision plus ou moins indulgente des attentats terroristes de juillet 2005 à Londres. La théorie de gestion de la terreur Il ne s’agit ici que de compréhension envers le terrorisme. Victimes et auteurs dans un cercle vicieux Cet enchaînement est-il fatal ?
La guerre, disent-ils « C’est la guerre ... », constatent les passants, voyant des policiers et militaires déployés dans la capitale, armes chargées, comme au temps de la guerre d’Algérie. Des spécialistes de la chose remontent même jusqu’à la Libération. Les enfants, partout, demandent : « C’est ça, la guerre ? ». Ou bien, « c’est quoi la guerre ? Le Monde consacre un titre au premier ministre français Manuel Valls pour qui « le jour de guerre est arrivé ». Larguez les amarres, allez défendre la France dans l’océan Indien… L’opération de com’ est de « bonne guerre », même si l’appareillage du Charles de Gaulle était programmé en fait depuis plusieurs mois ; et si le bâtiment, qui a des rendez-vous de coopération avec les marines saoudienne et indienne, ne consacrera sans doute que quelques semaines à un soutien à la coalition engagée contre l’Organisation de l’Etat islamique (OEI) en Irak, en se rapprochant de ce pays via le Golfe arabo-persique. Ennemi intérieur Pourquoi pas les chars ? Réarmement moral
Au commencement du jihad, l’humiliation et la revanche Le vif émoi ayant entouré l’attentat du 7 janvier contre Charlie Hebdo, puis l’assaut meurtrier contre la supérette Hyper Cacher deux jours plus tard, Porte de Vincennes, commence à peine à retomber dans l’Hexagone ; parallèlement, c’est tout le monde musulman qui s’enflamme en réaction à la réédition par le journal satirique des caricatures de Mahomet. Dans les deux cas, l’émotion collective reste centrale, cette même émotion qui s’est trouvée au cœur, dix ans plus tôt, de la spirale délétère dans laquelle les frères Kouachi et leur acolyte Amedy Coulibaly ont été emportés. Tandis que les détails continuent d’émerger quant au parcours des trois hommes et que les débats se poursuivent quant aux motifs de leur passage à l’islamisme, il semble utile de se pencher sur la parole des intéressés, qui en dit long non seulement sur leur psychologie individuelle comme collective, mais aussi sur la prévalence de l’émotion dans les phénomènes de violence politique et de terrorisme.
Le Palestinepédia: décryptage du conflit israélo-palestinien Le 23 septembre, l’OLP, l’Organisation de libération de la Palestine, devrait demander l’adhésion d’un Etat palestinien aux Nations unies. Une démarche palestinienne unilatérale, qui selon Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, fait suite à l’échec des négociations avec Israël. Les Palestiniens auront besoin des deux tiers des votes, soit 129 voix sur les 193 pays que comptent l’Assemblée générale de l’ONU. Une majorité qui semble presque acquise, avec le soutien affiché de plus de 120 pays. Les Etats-Unis ont déjà annoncé qu’ils opposeraient leur veto à la demande des Palestiniens. Mais le projet palestinien risque de n’avoir aucune valeur juridique. L’autre alternative verrait l’Assemblée générale des Nations unies élever la Palestine au rang d’Etat observateur non membre, comme le Vatican (ou la Suisse jusqu'à sa pleine adhésion à l'Organisation en 2002). Le partage de l’ONU en 1947 Après la première guerre de 1948 Après la guerre des six jours de 1967 Feuille de Route
Alain Bertho : « Une islamisation de la révolte radicale Le récent essai d’Emmanuel Todd Qui est Charlie ? a déjà fait couler beaucoup d’encre. Alain Bertho part de prémisses proches des siennes. Mais son cheminement ultérieur diffère sensiblement. Alain Bertho est anthropologue, directeur de la Maison des sciences de l’homme de Paris-Nord. Il travaille depuis dix ans sur les émeutes urbaines dans le monde. Regards. Alain Bertho. « Nous n’avons pas affaire à un phénomène sectaire isolé ni à une "radicalisation de l’Islam" mais plutôt à une islamisation de la révolte radicale. » Comment reconstituer, compléter le tableau ? À notre tour, nous devons faire ce travail et comprendre le sens des meurtres de Paris. Est-ce que des événements passés peuvent aider à comprendre ce qui s’enracine ici et maintenant ? Je pense qu’il nous faut comprendre que nous n’avons pas affaire à un phénomène sectaire isolé, et surtout que nous n’avons pas affaire à une "radicalisation de l’Islam", mais plutôt à une islamisation de la révolte radicale. Et maintenant ?
Ce que voulait de Gaulle en quittant l'OTAN, par Dominique Vidal (Le Monde diplomatique, avril 2008) « La France considère que les changements accomplis ou en voie de l’être, depuis 1949, en Europe, en Asie et ailleurs, ainsi que l’évolution de sa propre situation et de ses propres forces ne justifient plus, pour ce qui la concerne, les dispositions d’ordre militaire prises après la conclusion de l’Alliance. » C’est ainsi que, le 7 mars 1966, Charles de Gaulle – réélu trois mois plus tôt président de la République, mais au suffrage universel direct, par 55 % des voix contre 45 % à François Mitterrand – annonce au président américain Lyndon Baines Johnson le retrait de Paris du commandement militaire intégré de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN, créée en 1949). Un an plus tard, c’est chose faite : le 14 mars 1967, le général américain Lyman Lemnitzer, commandant suprême des forces alliées en Europe (Saceur) et des forces américaines en Europe, préside, à Saint-Germain-en-Laye, la cérémonie de départ. Philogaulliste, Le Figaro attend le 11 mars pour réagir.
Pourquoi tous ces coups d’Etat en Afrique ?, par Pierre Franklin Tavares (Le Monde diplomatique, janvier 2004) Coups d’Etat en Guinée-Bissau (septembre 2003) et à Sao-Tomé- et-Principe (juillet 2003), tentatives de putsch au Burkina Faso et en Mauritanie (octobre 2003), renversement de M. Charles Taylor par une rébellion au Liberia (août 2003), remous politiques au Sénégal (année 2003), déstabilisation de la Côte d’Ivoire (depuis septembre 2002)… l’Afrique de l’Ouest semble s’être durablement installée dans la crise politique. Et si certains pays y échappent, parmi lesquels le Cap-Vert, le Ghana et le Mali, pour combien de temps seront-ils à l’abri des secousses ? Les crises actuelles apparaissent d’une tout autre nature que celles qui affectaient les Etats africains dans les années qui ont suivi les indépendances. Tous les indicateurs macroéconomiques, sociaux et sanitaires se sont dégradés depuis les années 1980, éradiquant les classes moyennes et suscitant de profondes tensions sociales. La nécessité, disent les philosophes, est l’ensemble des accidents. Une recolonisation civile
Vos guerres, nos morts Ce sont les nôtres qui sont morts la nuit dernière. À la terrasse d’un restaurant, dans un bar, dans la rue, dans une salle de concert. Morts parce que des assassins ont décidé de frapper en plein Paris et de tirer dans la foule, avec pour objectif de faire le plus de victimes possible. 11h30. Pour une fois je suis d’accord avec lui. Vous êtes en guerre, vous les Sarkozy, Hollande, Valls, Cameron, Netanyahou, Obama. Et vous nous avez entrainés là-dedans, sans nous demander notre avis. Afghanistan, Iraq, Libye, Mali, Syrie… Nous n’avons pas toujours été très nombreux à protester. Car la guerre n’a pas commencé hier soir. L’une des causes de la sidération qui a touché de larges secteurs de la population, y compris les cercles militants, est la (re-)découverte de cette vérité : oui, la France est en guerre. Contre qui la France est-elle en guerre ? Voilà près de 14 ans que la France était en guerre sans l’assumer. Aucune raison de modifier une ligne de cet extrait. 12h. Aveuglément ? 13h.
Le retour du boomerang Au-delà de la polémique électoralement intéressée, et assez indigne, sur les mesures de sécurité prises, ou mal prises, par le gouvernement, la classe politique, les médias, l’opinion elle-même devraient s’interroger sur leurs responsabilités de longue durée dans le désastre que nous vivons. Celui-ci est le fruit vénéneux d’un enchaînement d’erreurs que nous avons commises depuis au moins les années 1970, et que nous avons démocratiquement validées dans les urnes à intervalles réguliers. La démission de l’Europe sur la question palestinienne, dès lors que sa diplomatie commençait là où s’arrêtaient les intérêts israéliens, a installé le sentiment d’un «deux poids deux mesures», propice à l’instrumentalisation et à la radicalisation de la rancœur antioccidentale, voire antichrétienne et antisémite. Les situations inextricables de l’Afghanistan, de l’Irak, de la Syrie, de la Libye ne sont que la résultante de ces erreurs de calcul, ou de ces calculs à courte vue. Jean-François Bayart
Ces (nombreux) pays que l'existence de Daech arrange bien Olivier Roy, spécialiste de l'islam et fin connaisseur du djihadisme, est professeur à l'Institut universitaire européen de Florence. Il est notamment l'auteur de "La Peur de l'islam" (L'Aube, 2015) et de "L'échec de l'Islam politique" (Points, 2015). Comment peut-on lutter efficacement contre Daech ? - La question de la lutte contre Daech est rendue plus complexe du fait que certains acteurs dans la région n'ont pas intérêt à le voir disparaître. Ils trouvent dans son existence un intérêt par défaut : il n'est pas leur ennemi principal mais secondaire. En Irak, les tribus sunnites ont eu recours à Daech pour se protéger des exactions des milices chiites ; les chiites d'Irak, eux, ne veulent pas prendre Falloujah ou Mossoul. Donc aucun acteur régional n'est prêt à en découdre au sol pour reprendre les terres sunnites de Daech ? - Non. La France, peut-être elle seule, voudrait éradiquer Daech. Bloqué au Moyen-Orient, Daech se lance donc dans une fuite en avant : le terrorisme globalisé.