Michel Foucault, l’Etat et les bons pauvres, par Pierre Rimbert (Le Monde diplomatique, mai 2013) Levier du changement social ou instrument de maintien de l’ordre ? Les outils de politique économique sont souvent à double tranchant. On nationalise tantôt pour collectiviser la richesse, tantôt pour socialiser les pertes ; l’impôt rançonne ou redistribue selon qu’il cible les pauvres ou les cossus. Il en va ainsi du revenu universel : suivant les forces sociales qui le mettent en œuvre (lire « Imaginer un revenu garanti pour tous ») il soustrait les peuples aux règles du marché ou, tout au contraire, les y soumet. Le dispositif proposé par l’économiste libéral Milton Friedman dans son livre Capitalisme et liberté (1) sous le nom d’impôt négatif entre sans ambages dans la seconde catégorie : l’Etat verse une somme fixe à chacun, mais, passé un niveau de revenus — situé par les libéraux autour du seuil de pauvreté —, le montant des impôts acquitté par le contribuable dépasse celui de l’allocation versée par l’Etat.
Suisse. Ruée lors d'une distribution gratuite de billets de banque « Surprise. 10 000 francs suisses sont distribués », ont annoncé, quelques heures avant l'opération menée en gare de Zurich, les coordinateurs de la campagne sur leur compte twitter (Grundeinkommen). Ils ont également mis en ligne des photos de la distribution, où l'on peut voir une foule de personnes cherchant à obtenir les billets dans le hall de la gare centrale. Une rente mensuelleLe 5 juin, les Suisses seront appelés à se prononcer sur l'initiative populaire « pour un revenu de base inconditionnel », qui est combattue à droite et par les syndicats, et qui ne compte que sur quelques soutiens à gauche. Cette initiative vise à permettre à toutes les personnes vivant en Suisse de mener « une existence digne ». Selon le gouvernement, qui s'oppose au projet, le financement du revenu de base inconditionnel ferait peser une charge énorme sur l'économie.
Non, le revenu universel n'est pas une utopie ! FIGAROVOX/TRIBUNE - La Fondation Jean Jaurès vient de publier une étude sur le revenu de base universel. D'un point de vue purement technique, ce dispositif est tout à fait faisable, estime Bertrand Chokrane, pour qui il reste à traiter les aspects politiques. Diplômé de l'Ecole normale supérieure et titulaire d'un post-doctorat au MIT, Bertrand Chokrane a été responsable du planning stratégique chez Renault-Nissan puis chez Dassault-Systèmes. Il est actuellement PDG d'une société d'analyse financière spécialisée dans le domaine de l'audit, du conseil et de la prévision de marché. Plus d'informations sur ce site. La crise que nous vivons n'est pas une crise cyclique, c'est une mutation profonde où la croissance disparait progressivement. Les plans de type keynésien n'ont jamais fonctionné. De même, ni les mesures d'austérité, ni les politiques monétaires laxistes avec des taux bas et des injections massives de liquidités ne fonctionnent. Que reste-t-il comme solution?
La France doit quitter l'OTAN, par Régis Debray (Le Monde diplomatique, mars 2013) Cher Hubert, Les avis rendus par un « gaullo-mitterrandien » — intrépide oxymore — connu pour son aptitude à dégonfler les baudruches pèsent lourd. Ainsi de ton rapport sur le retour de la France dans l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), que t’avait demandé en 2012 le président François Hollande, confiant — et qui ne le serait ? — en ton expertise et en ton expérience. Le bruit médiatique étant inversement proportionnel à l’importance du sujet, il n’y a pas de quoi s’étonner de la relative discrétion qui l’a entouré. Les problèmes de défense ne mobilisent guère l’opinion, et la place de la France dans le monde ne saurait faire autant de buzz que Baby et Népal, les éléphantes tuberculeuses du zoo de Lyon. Ce rapport m’a beaucoup appris, tout en me laissant perplexe. Le système pyramidal serait devenu un forum qui n’engage plus à grand-chose, un champ de manœuvre où chaque membre a ses chances, pourvu qu’il sache parler fort. La relation transatlantique a sa dynamique.
Financer l’allocation universelle, par Baptiste Mylondo (Le Monde diplomatique, mai 2013) « Mais ce serait impossible à financer ! » Voilà, d’ordinaire, la première objection faite aux promoteurs d’un revenu universel déconnecté de l’emploi. La première, mais sans doute aussi la plus faible. Si l’on se fie à son produit intérieur brut (PIB), la France est aujourd’hui le cinquième pays le plus riche du monde. En 2010, le revenu disponible (après versement des prestations sociales et prélèvement des impôts directs) s’y élevait à 1 276 euros par mois et par personne, adultes et enfants confondus. Nous disposons donc de ressources suffisantes pour garantir à chaque individu 1 276 euros si l’on décidait d’opérer un partage strictement égalitaire. Toutefois, si le financement est un faux problème, ses modalités, quant à elles, posent de vraies questions, car elles ne sont pas neutres et déterminent pour partie la portée d’un revenu inconditionnel en termes de transformation sociale et de partage des richesses. La question se pose surtout lorsqu’on envisage son autofinancement.
Marxiste, libéral, social, chrétien : l'ADN complexe du revenu de base Elle progresse, lentement mais sûrement, et pas seulement sous les étoiles de Nuit debout. Initialement considérée comme complètement utopique, l’idée d’un"revenu d’existence", ou "revenu universel", ou "revenu de base inconditionnel", est désormais entrée dans le champ politique classique, où elle fait l'objet d'un débat qui transcende les clivages habituels. Dans le rapport sur la réforme des minimas sociaux qu'il a remis au Premier ministre la semaine dernière, le député PS Christophe Sirugue suggère de fondre une dizaine de prestations (RSA, AAH, ASS, allocation veuvage…), afin d’aboutir à une "couverture socle commune" d’environ 400 euros par mois. Il met même en garde contre le revenu universel : s’il était instauré en suivant "certaines conceptions très libérales", écrit-il, il risquerait de "remettre intégralement en cause notre système de protection sociale". 1. La rémunération du travail, les allocations chômage, s’ajouteraient à cette première couche de revenu "de base". 2.
Revenu minimum universel : l'énième usine à gaz FIGAROVOX/TRIBUNE - Le revenu minimum universel va connaître des expérimentations en Finlande et en Suisse et suscite le débat en France. Pour Charles Wyplosz, il s'agit d'une «fausse bonne idée». Charles Wyplosz, professeur d'économie internationale à l'Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID) à Genève, est également directeur du Centre international d'études monétaires et bancaires. Le revenu minimum universel sans conditions est-il en train de devenir à la mode? Les Finlandais vont l'expérimenter sur un échantillon de la population, les Suisses vont voter sur une proposition généreuse et la question agite le petit monde politique français. À première vue, c'est une bonne idée. Les bonnes idées cachent parfois de gros défauts et peuvent être sujettes à la célèbre loi des conséquences imprévues ou bien à l'idée selon laquelle l'enfer est pavé de bonnes intentions. On en arrive tout naturellement à se poser la question du financement de l'opération.
Débat Bouteldja/Clavreul/Nouvel Obs : une mise au point | Indigènes de la République Débat entre Houria Bouteldja et Gilles Clavreul. En présence de Carole Barjon, Rémi Noyon, Timothée Vilars et Sara Daniel, journalistes au Nouvel Obs Houria Bouteldja a été invitée par le Nouvel Observateur à débattre face à Gilles Clavreul. Nous avons découvert en même temps que le grand public le dispositif mis en place par le journal pour encadrer cet échange. Que dire ? L’Obs : Il y a quelques semaines, une chanson du rappeur Nick Conrad créait le scandale en parlant de “tuer des bébés blancs”. Houria Bouteldja : J’étais un peu terrifiée au premier abord. Gilles Clavreul : Ce clip est effrayant. Bouteldja – C’est faux. « Indigène » n’est pas une identité mais un statut. Clavreul – En quoi vous vous trompez gravement. L’Obs : Au coeur de votre différend, il y a le concept de “race”. Bouteldja – Il faut être clair : la race biologique n’existe pas. Clavreul – Votre approche de l’Histoire est terriblement réductrice. Bouteldja – D’abord, ce n’est pas moi qui « classe ».
La cotisation, levier d’émancipation, par Bernard Friot (Le Monde diplomatique, février 2012) Qui contrôle les moyens de production ? Que produit-on, et sur la base de quelle définition de la valeur ? Questions décisives, mais absentes du débat public. Quand les salariés ploient sous l’austérité, les poser apparaît presque comme un luxe. Le salaire porte cependant un enjeu qui dépasse celui de la feuille de paie. La première suggère que le salaire servirait à satisfaire les besoins des travailleurs, comme en témoigne l’expression « prix de la force de travail ». Définir les producteurs par la ressource qu’ils tirent de leur « capital humain », et non par leur capacité à décider de la valeur économique (lire « Mots-clés »), et par conséquent de ce qui va être produit, par qui et comment : telle est la représentation que tente d’imposer le capitalisme. Il convient de préciser qu’on se réfère ici au salaire total, à ne pas confondre avec le salaire net — celui qui figure au bas de la feuille de paie — ni avec le salaire brut, qui ne constitue qu’une partie du salaire total.
Expérimentation du revenu universel en Finlande Par Guy Sorman Les politiciens de profession sont devenus très ennuyeux, ce qui explique l’émergence, dans toutes les démocraties occidentales, de partis rebelles : Ciudadanos en Espagne, Le Front national en France, le Tea Party, Parti du Thé aux États-Unis, les Indépendantistes catalans ou écossais… Il faut comprendre les électeurs : ils s’ennuient à subir les mêmes ritournelles, à droite et à gauche. La politique, dès l’instant où elle est devenue un spectacle, exige du nouveau. Mais pas seulement pour des raisons superficielles : les vieux programmes incessamment recyclés n’apportent pas de solution à des situations pénibles, durables, parfois héréditaires, comme le chômage des jeunes non qualifiés ou la dépendance excessive de certaines strates de la population envers les aides publiques. Ce ne sont pourtant pas les idées qui manquent, conçues et affinées par les économistes et sociologues dans les Universités, les Laboratoires, les Fondations et les études et ouvrages publiés.
Revenu universel : le dessous des cartes FIGAROVOX/ANALYSE - Les récents débats sur l'ubérisation, la numérisation et la protection sociale ont fait émerger clairement la question du revenu universel. Pour en décoder le sens, Eric Verhaeghe nous propose une petite géographie politique du revenu universel... Éric Verhaeghe est fondateur de Tripalio, une start-up sur la vie syndicale. Cet ancien élève de l'ENA a occupé des fonctions dans le monde patronal et assumé divers mandats paritaires. Il fut notamment administrateur de la sécurité sociale. Le revenu universel demeure, pour beaucoup de Français, une sorte de mystère coincé entre l'utopie et l'encouragement à la paresse. Le revenu universel et les libertaires Une première fraction des défenseurs du revenu universel appartient au monde libertaire et donc à l'extrême gauche. Le revenu universel et les libéraux de gauche Une autre fraction «de gauche» développe une approche plus théorique du revenu universel, plus systémique et moins utopiste.
Pétain, Macron et la mémoire, par Alain Garrigou (Les blogs du Diplo, 8 novembre 2018) Reprenons à l’inverse. Les luttes de mémoire ne sont plus aujourd’hui ce qu’elles étaient au temps du général de Gaulle dans les années 1960. Rien à gagner sur le plan électoral. Qui défend aujourd’hui Vichy ? Lire aussi Dominique Vidal, « En France à l’heure de Vichy », Le Monde diplomatique, septembre 2014. Et il y eut tant d’autres « fautes » depuis l’invention de la collaboration, la création du STO, le soutien à la milice, la lutte contre les « terroristes » de la résistance jusqu’à l’appel à se battre contre le débarquement allié de juin 1944. Lire aussi Benoît Bréville, « Pour remettre l’histoire à l’endroit », Le Monde diplomatique, septembre 2014.
Warren Buffett a-t-il raison quand il affirme que la lutte des classes existe et que ce sont les riches qui sont en train de la gagner ? Le milliardaire américain Warren Buffett a déclaré il y a quelques années, non sans humour, qu'il existait "bel et bien une guerre des classes mais c'est ma classe, la classe des riches qui fait la guerre et c'est nous qui gagnons". Unissez-vous Warren Buffet assure que les riches sont en train de gagner la lutte des classes. Ajouter au classeurSuivre ce contributeurLecture zen Intéressé par cet auteur ? Pour retrouvez facilement ses articles dans votre compte et recevoir une alerte à chacune de ses contributions : Lire ou relire plus tard Pour classer cet article et le retrouver dans votre compte : Besoin de vous concentrer Pour lire cet article dans sa version zen : Je m'abonne Alors que 1% des Américains accaparent 93% de l’augmentation des revenus, la part du profit des entreprises dans le PIB n’a jamais été aussi haute et celle des salaires n’a jamais été aussi basse. Vous avez atteint le nombre d'articles que vous pouviez lire gratuitement ces 30 derniers jours Abonnez-vous enquelques clics