Ce que l'on nous fait faire Jardins partagés, cafés associatifs, "squat" d'artistes, lieux d'expérimentations pluridisciplinaires, les communes branchées fourmillent de ces associations conviviales et décontractées adeptes de la positive attitude. On y restaure le lien social, on y expose des créations, on s'implique dans la protection de la planète, on y aide les autres, on y invite les voisins, on fait participer les populations censées se réapproprier l'espace public et on sensibilise les enfants. Ça plaît. C'est ainsi que s'accomplit l'enrôlement de la moyenne bourgeoisie et de la bourgeoisie culturelle prolétarisée, dans l'occupation intégrale de l'espace urbain, dans son gardiennage bénévole et dans la chasse au plus pauvre. Gardienne de son frère de misère, qu'elle participe à chasser du lieu qu'il habitait ou pourrait habiter, l'association précairement logée et chichement subventionnée devient aussi la gardienne d'elle-même. Pendant ce temps, le libéralisme continue son travail de sape.
Les entreprises ne créent pas l’emploi, par Frédéric Lordon (Le Monde diplomatique, mars 2014) Inanité du « pacte de responsabilité » Il ne se passe plus une semaine sans que le gouvernement socialiste français affiche son ralliement aux stratégies économiques les plus libérales : « politique de l’offre », amputation des dépenses publiques, stigmatisation du « gâchis » et des « abus » de la Sécurité sociale. Au point que le patronat hésite sur le cap à tenir. Il faut avoir sérieusement forcé sur les boissons fermentées, et se trouver victime de leur propension à faire paraître toutes les routes sinueuses, pour voir, comme s’y emploie le commentariat quasi unanime, un tournant néolibéral dans le « pacte de responsabilité » de M. En réalité, le tournant rectiligne ne fait qu’approfondir la logique du quinquennat telle qu’elle a été posée dès ses tout premiers mois. Pauvre logique, qui transpire les stratégies du désespoir et de la renonciation. Taille de l’article complet : 2 663 mots. (1) Proposé en janvier par M. (2) Lorsqu’il était premier ministre de M.
Joyce Maynard’s Second Chances Joyce Maynard did not fit in at Yale the first time around. When she arrived on campus as a freshman, in 1971, she was a lonely, aloof eighteen-year-old. She would wake at sunrise to compose letters to her parents about campus life, as though, she’d later recall, she were “Margaret Mead observing the behaviors of some South Sea island tribe.” When she could not find a “safe place to sit” in the dining hall, she’d smuggle small meals into her dormitory. On many weekends, she stood by the side of I-91 to hitchhike home, to New Hampshire. By the end of her first semester, she had applied to relocate to a so-called psychological single, on the far end of campus. In the decades since, Maynard has published more than fifteen books, among them three memoirs, several novels, two children’s books, a young-adult novel, and a true-crime thriller. Last February, she travelled to Yale for a campus visit. Maynard’s class at Yale was the third coed one in university history. Rose interrupted her.
La peste beige Le Front national ne se dit pas raciste. La Meute non plus. Et encore moins les chroniqueurs du Journal de Montréal et de Radio X. Jamais ils n’affirmeront qu’ils désirent fermer les frontières à «tous les immigrants», et encore moins que les blancs sont «supérieurs» aux noirs. Ce discours fonctionne à l’envers. Selon ce dernier, rien n’est raciste, sinon quelques soutanes blanches arborant la croix gammée. Critiquer l’arrivée de réfugié-es, ce n’est pas raciste. La haine véhiculée par ces propos réside moins dans l’énoncé lui-même que dans ce qu’il cache et suppose, comme à contre-jour. La haine n’est presque jamais affirmée directement. Le fascisme brun était offensif et conquérant, le beige se laisse porter par la déchéance du statu quo. Le fascisme brun était offensif et conquérant, le beige se laisse porter par la déchéance du statu quo. Dans une société démocratique, de tels propos seraient simplement considérés psychotiques. Notre société est celle du spectacle.
Pas un jour de plus au travail, par Danièle Linhart (Le Monde diplomatique, janvier 2020) La mobilisation de décembre impressionne à la fois par son ampleur et par sa diversité : jeunes et anciens, avocats, artistes, enseignants, dockers, cheminots, cadres d’entreprise, employés, médecins, infirmières, pompiers, musiciens, postiers, étudiants, lycéens, douaniers… ont défilé d’un même pas. Cette fièvre apparaît un an après le surgissement spectaculaire des « gilets jaunes (1) », à un moment où le mouvement donnait des signes d’essoufflement. M. Rarement un président de la République aura autant débattu avec les citoyens. Pourquoi, dans un tel climat, et après deux ans de « concertation » sur la réforme des retraites, les salariés se lancent-ils à corps perdu dans une mobilisation d’une telle ampleur ? En fait, nombre de Français découvrent que le « ni droite ni gauche » de M. Certains pensaient les syndicats dépassés, notamment ceux qui ne sont pas considérés comme réformistes. Selon une étude de 2014, 3,2 millions de salariés risquent le burn-out
The Most Powerful Drag Queens in America, Ranked RuPaul has become a genuine mogul. Who else has amassed true cultural capital? Who can bring home north of $1 million annually, or get cast in a Hollywood blockbuster? Here, after talking to talent agents and managers, club bookers, and Drag Race producers, as well as studying social-media influence, career longevity, and each queen’s “charisma, uniqueness, nerve, and talent,” we rank America’s top-100 Drag Race superstars. Reporters and judges: Mano Agapion, Rebecca Alter, Joel Kim Booster, Maria Elena Fernandez, Molly Fitzpatrick, Chris Heller, E. Alex Jung, Charlotte Klein, Genevieve Koski, Brian Moylan, Matthew Schneier, Matthew Silver, and Carl Swanson Age: 43 From: New York, NY Drag Race: Season 6 winner The queen of all Drag Race queens and the most successful alum, Bianca appeared on the show five years ago (and was so dominant that she reached the finale without having to lip-sync for her life). Halleloo! Age: 37 From: West Hollywood, CA Drag Race: Season 6 runner-up Blair St.
Au Chiapas, la révolution s’obstine, par François Cusset (Le Monde diplomatique, juin 2017) «Ils ont peur que nous découvrions que nous pouvons nous gouverner nous-mêmes », lance la maestra Eloisa. Elle le disait déjà en août 2013 aux centaines de sympathisants venus de Mexico ou de l’étranger pour apprendre de l’expérience zapatiste, le temps d’une active semaine en immersion. Baptisée ironiquement « Escuelita » (petite école), cette initiative visait à inverser le syndrome de l’évangélisateur, à « retourner la tortilla », comme y invitait jadis l’anthropologue André Aubry : s’instruire au contact des centaines de paysans mayas qui pratiquent, jour après jour, l’autogouvernement. Elle a lieu à une échelle non négligeable. Cette région de forêts et de montagnes de 28 000 kilomètres carrés (environ la taille de la Belgique) couvre plus d’un tiers de l’État du Chiapas. « Le capitalisme ne va pas s’arrêter. À l’école, histoire coloniale et critique du capitalisme Une organisation à la fois horizontale et verticale Quand Marcos appelait son âne « Internet »
De la valeur ignorée des métiers, par Pierre Rimbert (Le Monde diplomatique, mars 2010) A force d’évaluer toutes choses et toutes gens à l’aune de leur rendement monétaire — que rapportez-vous aux actionnaires ? —, il était fatal qu’on retournât un jour la question aux évaluateurs, mais posée d’un autre point de vue : que rapportez-vous à la société ? C’est à un tel renversement de perspective qu’invite une étude publiée en décembre dernier sous l’égide de la New Economic Foundation (1). Eilis Lawlor, Helen Kersley et Susan Steed, trois chercheuses britanniques, y abordent non sans malice la question des inégalités, en comparant la rémunération de certains métiers, sélectionnés aux deux extrémités de l’échelle des revenus, à la « valeur sociale » qu’engendre leur exercice. Dans le cas d’un ouvrier du recyclage, payé 6,10 livres sterling de l’heure (environ 7 euros), les auteures estiment que « chaque livre dépensée en salaire générera 12 livres de valeur » pour l’ensemble de la collectivité. Conseiller fiscal ou détrousseur social ? Prenons un publicitaire.
TÉMOIGNAGE - "J'ai senti la mort de près" raconte Laure, victime d'agression sexuelle Cette semaine, Montpellier accueille pour la première fois le congrès international francophone sur l'agression sexuelle. Il commence ce mardi et se tient jusqu'à vendredi, au Corum. Un congrès qui a lieu tous les deux ans pour rassembler des chercheurs, des intervenants de la communauté scientifique pour trouver des solutions pour réduire le nombre de victimes d'agressions sexuelles. Témoigner pour encourager les victimes à parler Laure Chelle, la présidente de l'association Stop aux Violences Sexuelles dans le Gard, accepte de témoigner pour la première fois. "Mon père conduisait, j'étais devant, assise sur les genoux de mon grand-oncle. "J'ai été une morte vivante." Plus tard, à trois ou quatre reprises, elle est victime d'attouchements de la part de son grand-oncle. "J'ai arrêté mes études, ma santé commençait à se dégrader par rapport à ce que j'avais vécu. C'est finalement à 34 ans que la mémoire lui revient. La mémoire lui est revenue à 34 ans
Charlie Hebdo », pas raciste ? Si vous le dites… - Olivier Cyran Post-scriptum 11 janvier 2015 : à tous ceux qui estiment que cet article serait une validation a priori de l’attaque terroriste ignoble contre Charlie hebdo (ils l’auraient bien cherché), la rédaction d’Article11 adresse un vigoureux bras d’honneur. Charognards ! Pour que les choses soient bien claires, il y a ce texte. Cher Charb, cher Fabrice Nicolino, « Et que ceux qui prétendent et prétendront demain que “Charlie” est raciste aient au moins le courage de le dire à voix haute, et sous leur nom. Ainsi donc Le Monde vous a charitablement ouvert son rayon blanchisserie, pour un repassage express de votre honneur tout chiffonné. S’il m’est arrivé à moi aussi, par le passé, de griffonner quelques lignes fumasses en réaction à tel ou tel de vos exploits, je ne me suis jamais appesanti sur le sujet. Raciste, Charlie Hebdo ne l’était assurément pas du temps où j’y ai travaillé. À Charlie Hebdo, il a toujours été de bon ton de railler les « gros cons » qui aiment le foot et regardent TF1.
Pourquoi la société salariale a besoin de nouveaux valets, par André Gorz (Le Monde diplomatique, juin 1990) Depuis le début de l’ère moderne, une question n’a cessé de se poser à l’Occident : dans quelle mesure la rationalité économique est-elle compatible avec ce minimum de cohésion sociale dont une société a besoin pour survivre ? Cette question se pose aujourd’hui sous des aspects nouveaux, avec une actualité et une acuité accrues. Le contraste est en effet saisissant entre la réalité et le discours lénifiant de l’idéologie dominante. Dans l’ensemble des pays capitalistes d’Europe, on produit trois à quatre fois plus de richesses qu’il y a trente-cinq ans ; cette production n’exige pas trois fois plus d’heures de travail, mais une quantité de travail beaucoup plus faible. En RFA, le volume annuel du travail a diminué de 30 % depuis 1955. Ces chiffres, notre civilisation, notre presse, nos représentants politiques préfèrent ne pas les regarder en face. La situation en France n’a rien d’exceptionnel à cet égard. « La rage de gagner », ce slogan répugnant
vintage everyday Comment le discours médiatique sur l'écologie est devenu une morale de classe - 26 novembre 2015 Jean-Baptiste Comby est sociologue, maître de conférences à l’Institut Français de Presse de l’Université Paris-2. A quelques jours de la COP21, il vient de publier «la Question climatique. Genèse et dépolitisation d’un problème public» aux éditions Raisons d’agir. BibliObs. Jean-Baptiste Comby. J’ai également réalisé des entretiens avec une quarantaine de journalistes chargés de la rubrique «environnement» ainsi qu’avec une trentaine de leurs «sources» (scientifiques, militants, fonctionnaires, etc.). Merci, votre inscription a bien été prise en compte. Pouvez-vous donner des exemples ? Les sujets télévisés que j’ai analysés se servent d’effets esthétiques assez répétitifs: le soleil qui brille, la tempête, le symbole du thermomètre, le contraste bleu/rouge qui représente le froid et le chaud. Une autre expression consacrée attribue la responsabilité du dérèglement aux «activités humaines», comme si toutes les activités polluaient de façon équivalente.
« Métro, boulot, tombeau », par Danièle Linhart (Le Monde diplomatique, novembre 2010) Les importantes mobilisations dans tout le pays, comme le soutien dont elles bénéficient dans l’opinion publique, indiquent à l’évidence une forte opposition au report de l’âge minimal de départ à la retraite de 60 à 62 ans, perçu comme illégitime. Mais elles nous en disent long, également, sur le monde du travail tel qu’il est massivement vécu depuis sa « modernisation ». La pénibilité croissante du travail y transparaît, ainsi que le sentiment d’une dégradation inéluctable. Ce ne sont pas seulement les deux années supplémentaires qui nourrissent des représentations aussi tragiques. En effet, pour asseoir son autorité et tenter de placer les salariés en situation d’autoexploitation, le management moderne pratique la déstabilisation systématique. Alors que le travail est devenu plus compliqué et l’environnement plus incertain, l’expérience accumulée n’est plus d’aucun secours. Les collègues deviennent des concurrents Il faut avoir les nerfs solides pour garder sa place dans cet univers.