L'anarchiste Par définition même, l’anarchiste est l’homme libre [1], celui qui n’a point de maître. Les idées qu’il professe sont bien siennes par le raisonnement. Sa volonté, née de la compréhension des choses, se concentre vers un but clairement défini ; ses actes sont la réalisation directe de son dessein personnel. A côté de tous ceux qui répètent dévotement les paroles d’autrui ou les redites traditionnelles, qui assouplissent leur être au caprice d’un individu puissant, ou, ce qui est plus grave encore, aux oscillations de la foule, lui seul est un homme, lui seul a conscience de sa valeur en face de toutes ces choses molles et sans consistance qui n’osent pas vivre de leur propre vie. Mais cet anarchiste qui s’est débarrassé moralement de la domination d’autrui et qui ne s’accoutume jamais à aucune des oppressions matérielles que des usurpateurs font peser sur lui, cet homme n’est pas encore son maître aussi longtemps qu’il ne s’est pas émancipé de ses passions irraisonnées. Élisée Reclus
D’une blague de gauche à l’offensive de l’ultra-droite: aux origines du politiquement correct En cette matinée ensoleillée du 4 mai 1991, il est 11h22 lorsque le président américain George Bush s’avance à la tribune pour prononcer le traditionnel discours inaugural de remise des diplômes de l’université du Michigan, à Ann Arbor. Devant des milliers d’étudiants et leurs professeurs, le président républicain ne peut que se réjouir: deux mois après la fin de la première guerre du Golfe, dans «un monde libéré de la guerre froide», les États-Unis rayonnent par leur puissance militaire et leur puissance économique, «promesses de liberté». Pourtant, un nouvel ennemi a «ironiquement» fait irruption en territoire états-unien «200 ans après le Bill of rights», soulève George Bush père. Ce nouvel adversaire de l’intérieur si fourbe et si insidieux porte un nom: le «politiquement correct». À 1min 39, Bush attaque la notion de «political correctness»: «Une croisade contre la civilité». Une «arme contre l’égalité» En revanche, l’origine exacte de la notion n’est pas claire du tout.
Design Justice : repolitiser le design Sasha Costanza-Chock (@schock), activiste, professeure associée au Laboratoire d’études comparatives sur les médias du MIT et chercheuse associée à la Ligue pour la justice algorithmique (@ajlunited), fondatrice du défunt Codesign Studio du MIT, est l’auteure de Design Justice : community-led practices to build the worlds we need (MIT Press, 2020, non-traduit, disponible en accès ouvert). Comme son titre l’indique, Design Justice invite à reconcevoir la justice sociale, c’est-à-dire les rapports de pouvoir. Notre conception du monde « trop souvent contribue à la reproduction d’une oppression systémique », explique la chercheuse qui travaille à la rencontre des études sur le numérique et des questions raciales et intersectionnelles (voir également le blog du chercheur Marc Jahjah pour une mise en perspective introductive à ces questions). Nos systèmes encodent des normes, des valeurs et des présupposés. Le Design Justice vise à se focaliser plus sur les problèmes que les solutions.
Un pavé dans les rouages Le sabotage, le grain de sable dans les rouages de la machine, l’opposition directe, physique, matérielle à une partie d’un dispositif. En République, on a toujours le droit de s’indigner d’une situation intolérable : les rafles de sans-papiers, les exactions policières, les expulsions locatives, les gens qui dorment dehors, les conditions de détention, tout cela peut faire l’objet d’autant de tribunes dans les journaux ou d’appels citoyens sur Internet. La démocratie adore ceux qui se contentent de dénoncer : c’est à dire de parler et de ne rien faire. C’est même la marque de la démocratie, ce dont elle ne cesse de s’enorgueillir. On peut (presque) tout y dire. Mais que l’on commence à s’organiser pour s’opposer concrètement aux actes du pouvoir, et tout change. Qu’est-ce qui est effectivement permis, comme acte concret, par ce système qui fait pourtant de la « liberté » un de ses principes ? La « liberté d’expression » elle-même n’est que théorique. anonymes
Le sexe comme construction sociale - Ce n'est qu'une théorie... J'ai créé ce blog d'abord pour stocker et partager facilement des 'explications' de trucs que je donne souvent. Il manquait une section un peu plus politique, qui fasse le lien entre l'éclairage entre ce que dit la science, et ce que la société doit en faire. J'ouvre cette section aujourd'hui avec ce texte sur la déconstruction du concept qu'est le sexe. Ceci en écho à l'article de l'Epervier définissant la construction sociale, et qui mérite d'être lu : Le sexe comme construction sociale Chez l'humain, on définit deux groupes, hommes et femmes. Que faire, donc, des exceptions aux critères? Typiquement on peut imaginer que (je prends des chiffres au pif, pour l'exemple) "les petites filles sont naturellement plus attirées par les bébés". Ce qu'il est intéressant de noter au final, c'est que tout ça, c'est un truc continu. Distributions avec plus ou moins de recouvrement Notes 1.
Peut-on limiter l’extension de la « société de la notation » ? Vincent Coquaz (@vincentcoquaz) et Ismaël Halissat (@ismaelhat), journalistes à Libération livrent dans La nouvelle guerre des étoiles (Kero, 2020) une bonne enquête sur le sujet de la notation : simple, claire, accessible, grand public. Leur synthèse prend la forme d’un reportage informé et rythmé, proche du journalisme d’investigation télé auquel nous ont habitué des émissions comme Capital ou Cash Investigation. Reste que derrière les constats que délimitent leur enquête, notamment celui du manque de fiabilité de la notation, se pose une question de fond : comment border, limiter ou réguler cette « société de la notation » qui se met en place ? La société de la notation Si la notation n’est pas née avec le numérique, celui-ci va être un incroyable accélérateur de « la société de la notation » et va favoriser son essor bien au-delà de la seule sphère scolaire où elle est longtemps restée limitée (la note s’étant peu imposée dans le monde du travail avant l’essor du numérique).
La grève des électeurs Une chose m’étonne prodigieusement - j’oserai dire qu’elle me stupéfie - c’est qu’à l’heure scientifique où j’écris, après les innombrables expériences, après les scandales journaliers, il puisse exister encore dans notre chère France (comme ils disent à la Commission du budget) un électeur, un seul électeur, cet animal irrationnel, inorganique, hallucinant, qui consente à se déranger de ses affaires, de ses rêves ou de ses plaisirs, pour voter en faveur de quelqu’un ou de quelque chose. Quand on réfléchit un seul instant, ce surprenant phénomène n’est-il pas fait pour dérouter les philosophies les plus subtiles et confondre la raison ? Où est-il le Balzac qui nous donnera la physiologie de l’électeur moderne ? et le Charcot qui nous expliquera l’anatomie et les mentalités de cet incurable dément ? Nous l’attendons. Je comprends qu’un escroc trouve toujours des actionnaires, la Censure des défenseurs, l’Opéra-Comique des dilettanti, le Constitutionnel des abonnés, M. Ah ! Octave Mirbeau
Inné et acquis, déterminismes et politique - Ce n'est qu'une théorie... Dans un contexte où les débats sur l'inné et l'acquis continuent d'occuper une place de choix en arrière-plan des débats sociétaux et politique, car ils sont sous-jacents a la question de savoir ce qui est de la responsabilité de l'individu (mérite et démérite) et de la société (donne t'elle les mêmes chances a tous?), et ce qui est 'naturel' ou 'culturel' (sous-entendu, souvent, 'pur et bon' versus 'artefactuel et mauvais'), il me semble qu'une mise au point sur ce que la biologie dit de ces concepts d'inné et d'acquis, et surtout, sur ce que ça implique, est absolument nécessaire. En particulier, les medias ne cessent de nous bombarder de gros titres: "Le cerveau des hommes est différent de celui des femmes", "La réussite scolaire dépend du QI", "On nait homosexuel". Des titres qui donnent l'impression que les choses sont simples à comprendre. Et en particulier qu'il existe des effets biologiques, naturels et figés, et à l’opposé, des effets culturels et malléables. Level 1. Level 2.
“Pour la moitié des Français, la violence policière est rassurante, pour l’autre, elle est choquante” - Médias / Net BFMTV, TF1, France 2… Jamais les chaînes télé ne s’étaient retrouvées devant autant d’images de violences policières. André Gunthert, maître de conférences en histoire visuelle à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), analyse cette soudaine visiblité. À force de blesser et mutiler depuis plus d’un an (éborgnements, mains arrachées, ITT en pagaille…), les violences policières se sont imposées dans les grands médias généralistes, quand bien même le gouvernement persiste à nier leur caractère systémique, insistant sur des dérives individuelles qu’il convient de punir au cas par cas. Diffusées sur les réseaux sociaux, reprises par les chaînes d’info en continu, les images qui ont infiltré l’espace médiatique ont joué un rôle essentiel dans la prise de conscience. La suite de cet article est réservée aux abonnés