Pour combattre la post-vérité, les médias condamnés à innover. Fakes news et « faits alternatifs » ont émaillé les campagnes du Brexit en 2016, de la présidentielle américaine, en 2017.
Ils se retrouvent aujourd’hui au cœur de la présidentielle française. Ils prospèrent dans les déclarations des uns et des autres et, surtout, dans les messages diffusés sur divers supports, à commencer par les réseaux sociaux. Il peut s’agir d’événements imaginaires, tel un massacre dans le Kentucky qui n’a jamais existé. Ce sont des chiffres erronés, tels ceux des participants à l’investiture de Donald Trump (20 janvier 2017) ou des manifestants en faveur du candidat Fillon, place du Trocadéro (meeting du 5 mars 2017). Ce sont des données inventées ou déformées, comme les prétendus millions de personnes irrégulières ayant voté aux élections américaines du 8 novembre 2016.
Des attentats sont annoncés ici. Comment comprendre cette prospérité d’un tel phénomène au moment où jamais les sources d’information n’ont été aussi abondantes et diversifiées ? Info ou intox : comment déjouer les pièges sur Internet ? Ep07 La desinformation - (pourquoi autant de trucs faux sur Internet) Élection française. La bombe ressemble finalement fort à un pétard mouillé.
Mercredi 3 mai, peu avant le débat d’entre-deux tours opposant Emmanuel Macron à Marine Le Pen, une personne poste sur un forum de discussions anglophone ce qu’elle présente comme des “preuves” de l’ouverture d’un compte offshore par le candidat d’En Marche! Marine Le Pen semblera même faire allusion à cette rumeur pendant le débat en lançant à son adversaire: “J’espère qu’on n’apprendra pas que vous avez eu un compte offshore aux Bahamas.” Mais aussi bien le trajet de la propagation de cette rumeur que des traces de montage et des incohérences dans les documents permettent de dire que ce sont en fait des “faux“. Le parquet de Paris a d’ailleurs ouvert, jeudi 4 mai, une enquête préliminaire pour “fausses nouvelles en vue de détourner les suffrages, faux, usage de faux et recel de faux“, à la suite d’une plainte d’Emmanuel Macron contre la diffusion sur Internet de ces documents.
Voilà pourquoi, qu'importent tous les faits et les preuves rationnelles qui contredisent vos opinions profondes, vous ne les accepterez jamais. Petite réflexion sur les biais cognitifs… Ou pourquoi vous perdez complètement votre temps à tenter de convaincre à tout prix cette personne pro- FN sur Facebook en la noyant sous des preuves rationnelles.
Il y a quelques jours, nous avions écrit un article à propos de ces mensonges souvent proférés par l'extrême droite (mais pas que lui) sur, notamment, les immigrés, les chômeurs, les étrangers, les pauvres… Bref, sur toutes ces personnes souvent stigmatisées par bien des politiques afin de polariser les opinions. Ces mensonges étaient systématiquement démontés, preuves et sources à l'appui. Il ne s'agissait pas là d'un débat d'idées (faut-il ou non aider les pauvres) mais de faits objectifs, incontestables. Et pourtant, de nombreuses personnes ont réagi à cet article par de l'agressivité, voire par une remise en cause pure et simple de la véracité des informations. Fig. C'est un phénomène assez courant sur internet. Et oui. Vous ne nous croyez pas ?
Ce biais de confirmation qui nous empêche de réfléchir. Quand les pionniers ont façonné Internet, ils avaient peut-être en tête de fonder la nouvelle bibliothèque d’Alexandrie.
Un endroit où seraient réunis et stockés les savoirs. Une merveille numérique accessible à tous et un agora numérique afin de communiquer et de se rapproche. Aujourd’hui, ils sont toutefois plus amers de leur création. L’ingénieur britannique Tim Berners-Lee, considéré comme un des pères fondateurs du Web, est craintif pour le réseau.
Dans un puissant texte publié dans le Guardian en mars 2017, il dénonce le détournement d’Internet par les états pour espionner les citoyens, par le ciblage politique des publicitaires et, surtout, la multiplication des fausses informations. L’actualité de l’année 2016 et 2017 ont accentué la propagation des « infaux ». Développer l’esprit critique contre les « infaux » Passée du surf léger, du babillage et du clavardage, à l’extraction de données à des fins de manipulation et de déstabilisation, la transformation numérique du paysage médiatique souligne l'importance croissante de l'éducation aux médias et à l’information.
Une éducation qui doit repenser les médias et les fondements politiques et éthiques qui les légitiment. Par Divina Frau-Meigs L’Éducation aux médias et à l’information (link is external) (EMI) est souvent appelée à la rescousse ces jours-ci alors que les médias sont menacés de toutes parts, tant dans les régimes totalitaires que dans les régimes démocratiques. L’alerte a été donnée en France le 7 janvier 2015, lors de l’attentat contre le magazine satirique français Charlie Hebdo – une attaque contre une des formes médiatiques les plus vieilles au monde, la caricature. J’étais alors directrice du Centre de liaison pour l’enseignement aux médias et à l’information (CLEMI) (link is external). Desinformation.