Coronavirus : qu'est-ce-que nous fait l'enfermement ? - Ép. 1/5 - Coronavirus, une conversation mondiale. Face à la pandémie de coronavirus, Le Temps du Débat propose une série d’émissions spéciales « Coronavirus : une conversation mondiale » pour réfléchir aux enjeux de cette pandémie, en convoquant les savoirs et les créations des intellectuels, artistes et romanciers du monde entier.
Par ces « conversations mondiales », nous souhaitons à la fois réfléchir à partir d’une pensée globale face à la pandémie, tout en soulignant les caractères particuliers de chaque situation géographique, mais aussi, les points de vue singuliers d’intellectuels, artistes et romanciers. Notre invitée Cristina Comencini est l'autrice d'une tribune "Chers cousins français" publiée jeudi 12 mars. Devant l’ampleur que prend la pandémie de coronavirus, Le Temps du Débat lance une série d’émissions spéciales rassemblant depuis chez eux intellectuels, écrivains et artistes du monde entier et réfléchissant ensemble au sens et aux conséquences de cette pandémie.
À l'intérieur. Coronavirus : confinements solidaires. Covid-19 : "Nous ne sommes pas accoutumés au recueillement", selon le philosophe Nicolas Grimaldi. Alors que les Français vivent confinés chez eux depuis ce mardi 17 mars, comment tenir psychologiquement, philosophiquement ?
Et que révèle cette situation de notre rapport aux autres et à nous-mêmes ? Pour répondre à ces interrogations, Florence Sturm est allée chercher l'éclairage du philosophe Nicolas Grimaldi. Cet ancien professeur à la Sorbonne a consacré la plupart de ses ouvrages à élucider nos expériences de la subjectivité. Il interroge notre rapport à la crise sanitaire actuelle et au confinement, avec le regard très particulier de celui qui vit lui-même "comme un trappiste cloîtré", dans l’ancien sémaphore de Socoa sur la Côte Basque. Il y réside depuis 1968, plus d’un demi-siècle donc : un salon au milieu de l’océan Atlantique et la mer "qui, très régulièrement, toutes les six heures, accompagne le plein champ… une sorte de chorale qui enfle lentement".
Que vous inspire cette situation ? Cette situation a un côté anachronique. C’est croire que la vie est faite d’instants. Puisque nous sommes seuls. Puisque nous voilà réduits à nous-mêmes, enclos et retranchés, astreints à un isolement en passe de devenir synonyme d’inaction, de stagnation, propice en apparence à la seule inquiétude, au repli, au malaise, puisque cet isolement – que la rhétorique hygiéniste et militaire nomme « confinement » – est en train de devenir notre quotidien imposé, puisque notre impuissance à agir s’étend de façon incommensurable, et qu’il ne nous est même plus possible d’offrir notre présence à ceux et celles que la pandémie emporte, puisqu’il est même interdit d’approcher la tombe où s’effacent les proches, puisqu’il nous reste, quoi ?
L’humour du barricadé ? Le livre du confinement #2 – Le manuel de survie de Mona Chollet. Covid-19 : "Un confinement de plus de dix jours peut causer des syndromes de stress post-traumatique" A quoi s'attendre quand on demande à la population d'un pays entier de rester chez elle pendant dix jours, deux semaines, un mois, voire plus ?
Quels vont être les effets sur son mental, sur ses comportements sociaux ? Et quelles pathologies pourraient apparaître ? Alors qu'un milliard de personnes sont désormais confinées dans le monde, depuis ce mardi 17 mars en France, pour limiter la propagation du Covid-19, la psychologue Catherine Tourette-Turgis a décortiqué les études scientifiques sur les effets psychiques de la quarantaine.
Et la fondatrice de l'Université des patients, directrice du master en éducation thérapeutique de Sorbonne-Universités, veut rappeler l'importance du soutien face à un phénomène qui peut être aussi difficile à vivre qu'une catastrophe naturelle. Que sait-on de l'effet du confinement sur notre psychologie aujourd'hui ? On sait que 35% des répondants ont présenté un stress psychologique modéré.
Et qui sont les plus exposés ? Le confinement n'est ni un atelier d'écriture de haikus, ni une retraite spirituelle. Temps de lecture: 7 min «This episode of Black Mirror sucks.»
Quand il s'est agi de dégainer une référence pop pour décrire cet absurde et télégénique confinement, la dystopie Netflix s'est vite imposée. Même si la série est abusivement invoquée à chaque phénomène moderne déconcertant, il y a en effet un peu de ça. Mais j'ai, pour ma part, davantage l'impression de vivre dans un cross-over inepte qui fait chauffer à gros bouillons une soupe mêlant: C'est, en tout cas, la sensation que l'on peut avoir (et ça n'est pas le cas de tous) si l'on est suffisamment désoeuvré et masochiste pour musarder sur Instagram ou n'importe quel média diffusant «un journal du confinement».
Bien sûr, ces récits, tout personnels qu'il soient, constituent a priori une formidable matière: ils permettent d'abord de documenter cet étrange moment. Bref, les récits de soi en période de confinement parviennent dans l'absolu à résoudre l'équation «Comment être ensemble en restant chacun dans son coin». Bon. « Confinement jour 3 : mon fils part en courant vers le jardin d’hiver, je le rattrape et m’esclaffe avec lui. Nous rions sans raison, assis dans les glycines, brins d’herbe en bataille dans les chevelures. Mais la sole de midi sur la table du jardin aura. Marie Darrieussecq : « Nous planquons au garage notre voiture immatriculée à Paris » Lire "Voyage autour de ma chambre", un texte ô combien d’actualité ! Emmanuel Laurentin, producteur du Temps du Débat, vous explique pourquoi Voyage autour de ma chambre (disponible en ligne sur Gallica, ou ici dans sa version numérisée) peut devenir un parfait manuel en temps de confinement, et reste de toute époque un classique très particulier.
Il est très-sûr, me disais-je, que les murs de ma chambre ne sont pas aussi magnifiquement décorés que ceux d’une salle de bal : le silence de ma cabine ne vaut pas l’agréable bruit de la musique et de la danse ; mais, parmi les brillants personnages qu’on rencontre dans ces fêtes, il en est certainement de plus ennuyés que moi. Au moment de la rédaction de ce récit, Xavier de Maistre, né d’une famille de Savoie, est alors militaire, assigné à résidence pendant quarante-deux jours à Turin, pour une affaire de duel interdit. Tel un dandy qu’il n’est pas, il décrit sa mise en quarantaine avec beaucoup de légèreté, y voyant l’occasion de se découvrir lui-même. Une ode à la méditation Se penser comme individu.